X-Men VS. Street Fighter

Premier cross-over des jeux de baston de Capcom, X-men vs Street Fighter est-il une vraie bonne idée ou juste un produit marketing sans grande inspiration ?

 

Vite, un pitch !

Siège des têtes pensantes de Capcom, milieu des années 90 : 

« Les gars, j’ai une idée géniale ! Si on faisait un méga versus fighting en reprenant les personnages de nos jeux de baston du moment ?

– Tu veux dire Street Fighter, X-Men et Darkstalkers ? 

– Juste X-Men et Street Fighter, les américains ne sont pas prêts pour Darkstalkers ! 

– Ouais pourquoi pas, on a déjà les sprites, les musiques, les bruitages… mais comment tu justifies le fait de les avoir dans le même univers ?

– On s’en tape ! T’as pas besoin de justifier, les X-Men contre les Street Fighters c’est juste cool ! Un rêve de gosse quoi !

– Désolé coco, mais il nous faut un scénario ici, toujours ! C’est la règle !

– Bah on a qu’à dire que Apocalypse a capturé des mutants et des Street Fighters pour monter une armée, du coup les deux groupes s’allient pour délivrer leurs potes.

– Banco !  »
Bon, je ne sais pas si ça s’est réellement passé comme ça, mais au final, c’est vraiment le pitch du jeu. Un prétexte comme un autre qui lancera la mode des cross-overs plus ou moins inspirés de Capcom, ce qui permettra plus tard à nos chers Ryu et Ken d’affronter les combattants de SNK ou de Namco. Mais revenons en septembre 1996, date de sortie du jeu qui nous intéresse aujourd’hui, soit presque 1 an après la sortie de Marvel Super Heroes et 6 mois après celle de Street Fighter Alpha 2, tous les deux excellents.  Comme ces derniers, X-Men vs Street Fighter voit le jour sur le système CPS-2, qui malgré son succès, risque d’arriver bientôt au terme de sa carrière puisque Capcom planche déjà sur son remplaçant, le CPS-III.

 

Mieux que les Expendables

Bon, voyons donc si Capcom a eu la main heureuse pour le choix des membres qui représenteront chaque « famille » de combattants. Côté X-men, on retrouve Wolverine, Storm, Cyclops, Juggernaut et Magneto, issus de Children of the Atom, auxquels s’ajoutent Rogue (Malicia), Gambit et Sabretooth, exclusifs à ce nouvel opus ! Un choix qui risque de ravir les fans des comics, heureux de pouvoir incarner le ténébreux Gambit et peut-être soulagés de ne pas retrouver Spiral ou Shuma Gorath. Pour les Street Fighters, on fait dans le traditionnel avec Ryu, Ken, Chun-Li, Zangief, Dhalsim, Charlie, Cammy et Dictator. Un casting qui ferait presque penser à SF2 si Charlie ne nous rappelait pas que l’on est dans l’ère Alpha. A noter qu’il s’agit là de la toute première apparition de Cammy dans son look « Alpha », bien avant SFA3 ou SFA2 Gold. Tel un charognard attendant la moindre occasion de se jeter dans la baston sans y avoir été invité officiellement, Akuma est également de la partie, faisant office de personnage semi-caché, puisqu’il suffira d’aller tout en haut du select screen pour faire apparaître sa vignette et le sélectionner. Contrairement aux deux précédents opus de la saga Marvel, il n’est plus question ici de séparer méchants, gentils et d’équilibrer les forces puisque le seul ennemi commun à tout ce beau monde est Apocalypse, l’unique boss du jeu. Au final, on se retrouve donc avec 17 personnages directement jouables, ce qui est plus qu’honnête par rapport aux précédentes productions de la firme et fait honneur à l’esprit rassembleur du titre que l’on espérait. Non content d’être simplement riche, ce casting est très varié et équilibré, avec tous les types de combattants représentés, de la fine et rapide Cammy à l’énorme masse de muscles qu’est Juggernaut en passant par les équilibrés comme Ryu ou Cyclops, tout le monde y trouvera son compte. Là, on se dit aussi que ce cross-over n’est peut-être pas qu’une sorte de pot-pourri de deux sagas puisque les développeurs ont pris la peine de créer 5 nouveaux personnages complets, ce qui représente tout de même un sacré boulot !

 

Petite regression…

Street Fighter Alpha 2 et Marvel Super Heroes, les deux prédécesseurs, étant visuellement exceptionnels, on était donc en droit d’attendre une qualité au moins équivalente pour ce X-Men vs Street Fighter. Malheureusement, on est légèrement déçu par le résultat global. Certes, le jeu est plutôt beau, avec des sprites fidèles aux deux jeux précédemment cités, mais pour le reste, on ne retrouve ni les couleurs chaleureuses, ni les artworks ultra dynamiques, ni la finesse des décors. En fait, on a l’impression que ce jeu fait directement suite à X-Men : Children of the Atom avec des couleurs parfois ternes, un select screen super rigide, des barres de vie tristounettes, des gros plans des personnages façon SF Alpha 1 et, plus globalement, une esthétique un peu ringarde ! 

Les arrières-plans sont souvent à l’image de ce visuel décevant, avec très peu de décors dynamiques à la X-Men, beaucoup d’environnements naturels, jolis mais tristement vides et un manque de variété flagrant. Seul les décors urbains parviennent à se détacher du lot avec un Manathan sur 2 niveaux très réussi et une raffinerie s’enflammant sous nos yeux plutôt bien trouvée. A noter quelques clins d’oeils sympa en arrière plan tels que la présence de Blanka en montagne ainsi que Dan et Psylocke emprisonnés dans le décor d’Apocalypse. Néanmoins, avec ces décors en mode « service minimum », on en arrive à se demander très sérieusement si ce jeu n’a pas commencé à être développé bien avant Marvel Super Heroes et Street Fighter Alpha 2 ou s’il il n’a pas été finalisé un peu trop vite, entre deux sorties du planning ultra chargé de Capcom.

  

…mais grosses explosions !

Bon, ça n’est pas du tout catastrophique, l’ensemble reste cohérent, parfaitement lisible (les décors un peu vides aidant), d’une fluidité exemplaire et le plus important est là : le spectacle ! A ce niveau, le jeu fait clairement honneur aux deux précédents opus Marvel et l’on retrouve avec bonheur des super combos ravageurs qui font pleuvoir un déluge d’effets visuels sur notre écran ! Le plus jouissif reste encore la découverte de ces coups chez les Street Fighters, qui voient alors leurs furies complètement dopées dans cet univers Marvel. Le super hadoken de Ryu traverse maintenant tout l’écran et n’a rien à envier à un kamehameha, le kikosho de Chun-Li fait le ménage sur presque toute la zone de combat et même un simple yoga’s flame craché par Dhalsim pourrait rivaliser avec un lance-flamme à longue portée ! Bref, c’est un réel bonheur de voir Ryu, Chun-Li et toute la bande en mode super-héros Marvel et on en redemande ! Le côté BD est également bien présent avec des écrans entre les combats façon comics et l’apparition du portrait de chaque personnage au déclenchement d’une furie. Effet garanti.

Pas grand chose de particulier à signaler sur l’aspect sonore du titre, les bruitages font le job et les voix des combattants sont accompagnées par celle d’un narrateur enthousiaste ponctuant vos plus beaux combos. Côté musiques, on retrouve pas mal de thèmes connus, particulièrement chez les Street Fighters, et on constate une tendance aux musiques un peu jazzy du côté des X-Men, en particulier pour les thèmes des nouveaux venus, ce qui rompt avec l’esprit plus épique d’un Marvel Super Heroes. Une particularité que l’on retrouvera, poussée à l’extrême, quelques années plus tard dans un futur opus.

 

Un SF avec les X-Men ou l’inverse ?

Pour ce qui est du gameplay, la grande question est de savoir si ce dernier repose sur un zoning façon Street Fighter ou plutôt sur les combos, comme dans les précédents versus fighting Marvel. Désolé pour les fans inconditionnels de SF, X-Men vs Street Fighter reprend exactement le gameplay de X-Men Children of the Atom, en lui ajoutant néanmoins quelques nouveautés sympas. On retrouve donc les super sauts, les dash, la récupération au sol et la garde aérienne, mais on découvre également la possibilité de repousser une attaque ou un combo en appuyant sur les 3 poings pendant la garde. Contrairement au counter de Marvel Super Heroes, ce « push » ne consomme pas du tout de barre de super et permet de riposter rapidement et d’éviter de se faire acculer dans un coin. Une très bonne idée qui devient vite un réflexe et colle bien avec ce type de gameplay nerveux où on peut vite se faire démonter sans pouvoir réagir. Bien entendu les combos sont toujours de la partie, debout, en l’air et même au sol, ils sont plus abusés que jamais, ce qui donnera d’ailleurs une mauvaise réputation au jeu en tournois mais ravira les amateurs d’infinis ! Là encore, on peut imaginer que Capcom n’aurait peut-être pas laissé autant de permissivité dans les enchaînements si le jeu n’avait pas connu un développement trop rapide… mais je m’égare, ça n’est qu’une supposition !

A cette base de gameplay désormais connue, s’ajoute une particularité qui fait toute l’originalité du titre : le tag battle. En effet, ça n’est pas un mais deux personnages que vous choisirez en début de partie, bien que les combats restent en 1 contre 1. En plein match, vous pourrez alors alterner avec votre partenaire à tout moment en appuyant sur poing fort et pied fort simultanément et celui qui ne sera pas à l’écran récupérera un peu de vie. Vous pouvez également faire appel à votre co-équipier pour faire un counter (comme dans Marvel Super Heroes) ou même déclencher une furie à deux, ce qui vous coutera respectivement une et deux barres de super. Ce mode de jeu, jamais vu chez Capcom, s’il ne révolutionne pas le combat en lui même, permet une approche stratégique intéressante où vous devrez gérer correctement la santé de chacun des deux combattants tout en essayant d’avoir le match-up le plus favorable possible selon l’adversaire qui se trouve en face de vous. Une bonne idée qui redonne un coup de souffle au genre et à la durée de vie du titre, tout en rehaussant le spectacle d’un cran lorsque 3 ou 4 combattants sont simultanément à l’écran.

 

« I am the apocalypse ! »

Concrètement, le jeu est très agréable à jouer. On retrouve vite ses marques pour peu que l’on ai essayé Children of the Atom ou Marvel Super Heroes. On s’habitue très vite au tag et switcher d’un personnage à l’autre devient rapidement instinctif. Contre le CPU, le titre sera assez facilement bouclé, avec une difficulté moyenne, voire assez facile selon les équipes que vous aurez en face de vous. A noter la relative répétition de celles-ci avec des duos récurrents (Ryu-Cyclops, Zangief-Juggernaut, Dictator-Magneto) alors qu’il y avait moyen de faire de vraies équipes random. Dommage. J’ai également remarqué ça et là un certain abus de techniques pourries de la part du CPU, en particulier lorsqu’il s’agit de switcher intempestivement d’un personnage à l’autre. Évitable, mais particulièrement agaçant et donnant l’impression de jouer contre un gosse qui viendrait de trouver la manip ! Mention spéciale à Apocalypse le boss de fin qui vous en mettra plein les yeux avec sa taille démesurée, jamais vue jusque là dans un versus fighting (il occupe toute la hauteur de l’écran du bas du torse à la tête). Cette habitude du monstrueux boss abusément grand deviendra d’ailleurs une tradition dans la série, jusqu’aux récents épisodes. Même si son arsenal est plutôt conséquent et certains coups dévastateurs (argh, cette foreuse infernale !), Apocalypse reste assez simple à battre et ses paterns vite identifiables. Une fois ce dernier vaincu, vous devrez départager les deux membres de votre équipe pour le titre suprême en vous affrontant. Le joueur 1 sera alors celui qui aura donné le coup de grâce à Apocalypse et le jeu redevient un versus fighting en 1 contre 1 classique.

En versus contre un autre humain, c’est une autre histoire… Si vous êtes deux novices, les parties peuvent être très drôles, mais il suffit que l’un des deux connaissent quelques combos abusés, voire infinis et le jeu se transforme vite en démo où l’autre peut aller se faire couler un café en attendant le round suivant… frustrant ! Reste le cas de deux joueurs confirmés qui donne lieu à des matchs plus tactiques qu’on pourrait le penser où toute la difficulté n’est pas dans l’exécution d’un combo de malade mais bel et bien dans le fait de réussir à percer la défense de l’adversaire (voire juste réussir à s’en approcher !).

 

On en redemande !

Oui, X-Men vs Street Fighter est un très bon jeu ! Même si son esthétique générale semble en régression par rapport à Marvel Super Heroes, le jeu reste globalement bien supérieur à Children of the Atom. Le nombre de personnages est impressionnant, ces derniers sont très bien choisis, à la fois populaires, variés et complémentaires, il faudrait être très difficile pour ne pas trouver son bonheur ! L’esprit grand spectacle de la série monte encore d’un cran avec de nouvelles furies impressionnantes et un boss de fin gigantesque qui restera dans les mémoires des gamers. Le gameplay reste fidèle à la saga avec quelques évolutions bienvenues et surtout la mise en place des combats en tag, qui deviendra la marque de fabrique de la série. Malgré tout, on sent ça et là que le jeu est encore largement perfectible, en particulier au niveau des combos, très permissifs, qui plairont aux amateurs d’entraînements acharnés, mais risquent de rebuter les joueurs occasionnels. Dans tous les cas, Capcom tient là une bonne base de travail pour faire évoluer la série !

Comme pour les précédents épisodes Marvel, X-Men vs Street Fighter sera adapté sur les consoles de l’époque, à savoir la Playstation et la Saturn. Sur cette dernière, le jeu était vendu avec une cartouche augmentant la ram de la console, ce qui permettait une adaptation très fidèle à l’arcade, avec juste un temps de chargement au lancement du jeu en plus. Par contre, sur Playstation, non seulement on a aussi les chargements, mais on se retrouve surtout avec une animation simplifiée, donnant au jeu une raideur très désagréable, amplifiée par une vitesse de jeu moindre qu’en arcade et quelques ralentissements. Pire : à cause des limitations techniques de la console, le mode tag est purement et simplement absent ! Certes, on peut choisir un second combattant, mais celui-ci ne pourra que participer aux double furies et donner un coup spécial en soutien, mais en aucun cas vous pourrez switcher avec lui en plein match ! Bon ok, en vrai on peut jouer en tag dans un mode spécial qui implique que l’adversaire ait exactement les 2 même personnages que vous ! La frustration à l’état pur.

 

La note du gros JYP :  

 

Dream team

Au final, un cross-over perfectible mais conçu sur des bases solides et offrant un casting de rêve.

 

Ma vidéo de Gameplay sur 1 credit, version Arcade:

Share Button
Commentaires: Commentaires fermés sur X-Men VS. Street Fighter

Les commentaires sont fermés.

Archives